Le Sénat va poursuivre l’examen du projet de loi Sapin II et la presse nous apprend que le gouvernement va finalement réintroduire la réduction de la durée de validité du chèque de un an à six mois. Cette disposition était présente dans le projet initial de la loi dite Sapin II mais j’ai réussi (1) à la faire supprimer en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale au mois de septembre. Derrière la question de la durée, le signal envoyé est clair : le chèque doit mourir.
Le projet de Bercy mène une politique constante : haro sur l’argent liquide, haro sur le chèque et vive le tout-électronique. Cette fuite en avant dans le numérique mériterait d’être un peu réfléchie quand on connait la dimension symbolique de la monnaie. Pour se débarrasser de ces deux outils décrétés « archaïques », on les accuse de tous les maux: le paiement liquide serait l’antichambre du blanchiment, le chèque serait toujours un chèque en bois.
Arrêtons les caricatures ! Le chèque est le moyen de paiement quotidien de millions de Français ordinaires : chefs d’entreprises, locataires qui se méfient du prélèvement automatiques, adhérents d’associations, usagers des services publics locaux… la monnaie met en toujours en enjeu une relation de confiance et des millions de Français font confiance aux chèques qui représente moins de 10% des transactions mais qui correspond encore des usages des situations de la vie quotidienne. Le gouvernement devrait être prudent quand il déstabilise ainsi la vie quotidienne des Français pour des raisons inavouées et inavouables.
Vive le chèque, vive le chèque gratuit
Le chèque est gratuit, comme le prévoit l’article L131-71 du Code monétaire et financier reprenant une disposition de 1935. Cette gratuité est un grand défaut à l’âge où les banques ont pris l’habitude d’assommer leurs clients de services lourdement facturés. Il faut défendre le chèque, le chèque gratuit.
Concernant la sécurisation, il faut prendre la question au sérieux et aujourd’hui des solutions techniques existent pour sécuriser pour un coût nul un chèque et faire disparaitre le chèque en bois du point de vue des vendeurs et surtout faire disparaitre l’interdit bancaire, mesure qui elle est bien d’un autre temps.
C’est aux Français de décider si le chèque doit mourir, pas aux technocrates de Bercy ni au lobby bancaire. Le chèque meurt doucement, la Banque de France notait en 2011 une accélération de la désaffection. Certains choix règlementaires ont poussé dans ce sens, on voit bien qu’avec la loi Sapin II le gouvernement propose d’accélérer encore. Ca n’est pas une fatalité.
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